Imaginez si MySpace avait pu payer pour limiter le développement de Facebook", explique Marvin Ammori du think tank New America Fondation

Publié le 13 Mai 2014

Imaginez si MySpace avait pu payer pour limiter le développement de Facebook", explique Marvin Ammori du think tank New America Fondation

La high-tech américaine unie pour défendre la neutralité du Net.

Netflix n'est plus seul à publiquement s'inquiéter de la possible remise en cause de la neutralité du net aux Etats-Unis.

Jeudi 8 mai, plus de 150 sociétés sociétés Internet ont adressé une lettre ouverte à la Federal Communication Commission (FCC), le gendarme américain des télécoms, pour défendre ce principe qui assure un traitement équitable entre tous acteurs du web. Parmi les signataires: Google, Microsoft, Amazon, Facebook, Twitter et Netflix.

"ESSENTIELLE POUR LE FUTUR D'INTERNET"

"Les règles de la Commission devraient protéger les utilisateurs et les sociétés Internet contre les blocages, les discriminations et les accès prioritaires payants", assène ce courrier adressé aux cinq commissaires de la FCC. "De telles règles sont essentielles pour le futur d'Internet. Cette Commission devrait prendre les mesures nécessaires pour s'assurer qu'Internet demeure une plate-forme ouverte pour l'expression et le commerce, afin que l'Amérique continue d'être leader sur les marchés technologiques".

Ce courrier s'inscrit dans le cadre d'une consultation publique menée par la FCC. Celle-ci doit aboutir sur la mise en place un nouveau cadre réglementaire, le précédant, établi en 2010, ayant été jugé illégal par la justice américaine. Un projet, présenté fin avril, prévoit d'autoriser les fournisseurs d'accès à Internet à facturer un "traitement préférentiel". Autrement dit, une connexion optimale pour les sites qui acceptent de payer.

Un groupe d'une cinquantaine d'investisseurs prestigieux - comme Andreessen Horowitz, Union Square Ventures et SV Angel -, ont également écrit à la FCC. "Si les grandes sociétés peuvent payer pour une meilleure vitesse de connexion ou un temps de latence plus faible, Internet ne bénéficiera plus de règles du jeu équitables, dénoncent-ils. Les start-up dont les services dépendent de la vitesse (jeux, vidéos, systèmes de paiement) ne pourront certainement pas surmonter ce déficit, peu importe leur degré d'innovation".

DIZAINES DE MILLIERS D'EMAILS

Le cadre réglementaire défendu par Tom Wheeler, le président de la FCC - et accessoirement ancien lobbyiste pour les FAI ! -, est encore loin d'être adopté. Plusieurs étapes restent à franchir. A commencer par convaincre ses collègues. Le gendarme des télécoms compte cinq commissaires. Deux d'entre eux, nommés par les républicains, se sont prononcés contre tout projet visant à réglementer le web.

Le sort du texte dépend donc des deux membres restants, deux commissaires nommées par les démocrates. Leur soutien est indispensable. Or, Barack Obama avait fait de la neutralité du net l'une de ses promesses de campagne. En outre, la pression de l'opinion publique pourrait également être forte: plusieurs dizaines de milliers d'e-mails ont été déjà envoyés à la FCC. Les deux administratrices, qui ont exprimé certaines réserves sur ce projet, ont assuré qu'elles écouteraient ces réactions.

DÉBIT LIMITÉ

A l'heure actuelle, les opérateurs ne peuvent pas faire payer les gros consommateurs de bande passante pour maintenir une vitesse de connexion rapide sur leur site. Cela pourrait donc changer. Les sites qui refusent de payer s'exposent à un débit limité et prennent ainsi le risque de voir les internautes fuir vers des concurrents qui ont accepté. Et qui sont donc plus rapides.

Netflix et YouTube sont les deux premiers visés. Les deux plates-formes de vidéos sont de très loin les plus gros consommateurs de bande passante aux Etats-Unis. Reed Hastings, le patron de Netflix, a déjà indiqué que sa société n'aurait pas d'autre choix que d'accepter les conditions des FAI.

MENACE SUR L'INNOVATION

Les principales victimes de la remise en cause de la neutralité du net ne seront pas forcément ces grandes sociétés. Mais les start-up aux ressources financières limitées. "Le risque, c'est de limiter l'innovation en accordant un avantage compétitif aux acteurs déjà en place. Imaginez si MySpace avait pu payer pour limiter le développement de Facebook", explique Marvin Ammori du think tank New America Fondation.

Pour contourner ce problème, la nouvelle réglementation prévoit d'imposer un tarif "commercialement raisonnable". Mais ce prix ne sera pas fixé par la loi. Il sera déterminé au cas par cas par la FCC, au terme d'une procédure encore inconnue. Le régulateur imposera aussi une vitesse de connexion plancher pour tous les sites web. Mais le niveau n'a encore été défini. Il ne sera certainement pas suffisant pour permettre de regarder des vidéos sans coupures incessantes.

"QUELQU'UN DOIT PAYER"

"Ce revirement serait un énorme pas dans la mauvaise direction, réagit Gabe Rottman, de l'organisation American Civil Liberties Union. Les barrières à l'innovation vont progresser, le marché des idées sur Internet sera restreint et, au final, ce sont les consommateurs qui en paieront le prix".

"Donner aux FAI le feu vert pour mettre en place un schéma payant sera un désastre pour les start-up, les organisations et les internautes qui ne peuvent pas régler ces péages non nécessaires, estime le mouvement Free Press. Ces utilisateurs seront poussés sur les chemins de terre du web, pendant que les riches sociétés Internet bénéficieront de ces nouvelles voies rapides."

De leur côté, les opérateurs Internet assurent que rien ne changera pour les internautes. Ils justifient leurs démarches par les milliards de dollars dépensés pour moderniser leur réseau face à l'explosion du trafic. "Quelqu'un doit payer", indiquait récemment Jim Cicconi, vice-président chez AT&T. Selon ce responsable, la position de Netflix, vent debout contre cette réforme, "consiste à dire que tout le monde doit payer sauf Netflix".

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Si les grandes sociétés peuvent payer pour une meilleure vitesse de connexion ou un temps de latence plus faible, Internet ne bénéficiera plus de règles du jeu équitables, dénoncent-ils. Les start-up dont les services dépendent de la vitesse (jeux, vidéos, systèmes de paiement) ne pourront certainement pas surmonter ce déficit, peu importe leur degré d'innovation

Un groupe d'une cinquantaine d'investisseurs prestigieux - comme Andreessen Horowitz, Union Square Ventures et SV Angel

Le risque, c'est de limiter l'innovation en accordant un avantage compétitif aux acteurs déjà en place. Imaginez si MySpace avait pu payer pour limiter le développement de Facebook

Marvin Ammori du think tank New America Fondation

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