Au nom de la science, Facebook manipule 700 000 utilisateurs
Publié le 30 Juin 2014
Au nom de la science, Facebook manipule 700 000 utilisateurs
Êtes-vous les cobayes sans le savoir d’une expérience scientifique sur les réseaux sociaux ? C’est cependant le cas de près de 700 000 membres anglophones de Facebook, qui ont été observés à leur insu et manipulés dans le cadre d’une étude sur la contagion émotionnelle.
La revue scientifique américaine « Comptes rendus » de l’Académie nationale des sciences a publié le 17 juin une étude (http://www.pnas.org/content/111/24/8788.full.pdf+html?sid=f52ffcf8-a3df-4878-b9eb-f734c0e0bb26) menée par les chercheurs américains en collaboration avec Facebook. Celle-ci porte sur la « contagion émotionnelle », c’est-à-dire la transmission d’émotions à grande échelle et son impact sur le comportement des utilisateurs.
Facebook fut le terrain d’études pour cette expérience, tandis que 689 003 utilisateurs anglophones servaient de cobayes, à leur insu. Entre les 11 et 18 janvier 2013, une équipe d’universitaires a modifié le contenu des informations visibles par des utilisateurs sur leur « mur » afin d’étudier l’impact des publications positives et négatives sur leurs émotions.
Pour cela, Facebook et les scientifiques ont modifié les données reçues à la source, via un algorithme du réseau social. Celui-ci, associé à des mots clés, a fait apparaître sur les fils d’actualité (News Feed) des informations à teneur émotionnelle. Le but des chercheurs étaient de déterminer si oui ou non les contenus lus sur le réseau social ont une influence sur ce que publient les utilisateurs.
La teneur des publications influence nos comportements
L’expérience fut un succès, puisque le comportement des utilisateurs évoluait en fonction des « fausses » publications lues. Ainsi, lorsqu’ils se trouvent exposés à des contenus négatifs, les membres du réseau social utilisent eux-mêmes dans leurs publications des mots-clés négatifs. Les chercheurs en concluent que la contagion émotionnelle de masse est bien réelle, notamment sur les réseaux sociaux.
En outre, « étant donné l'ampleur massive des réseaux sociaux tels que Facebook, même les petites causes peuvent avoir des conséquences globales » : les expériences en ligne influencent les émotions des utilisateurs, « ce qui peut affecter une variété de comportements hors ligne ».
Si cette étude est intéressante d’un point de vue scientifique, elle soulève quelques questions d’un autre ordre. Les chercheurs et Facebook indiquent que l’étude et la sélection d’internautes sans demander leur consentement est tout à fait en adéquation avec les Conditions Générales d’Utilisation de Facebook, une politique qu’acceptent les membres du réseau social dès leur inscription. Mais si légalement l’expérience est irréprochable, les médias américains mettent en cause l’éthique de ce type de pratiques.