Avec leurs innovations, Google et Apple menacent les constructeurs automobiles

Publié le 6 Juin 2015

Les nouveaux véhicules autonomes de Google rouleront dans quelques jours. Les modèles précédents ont parcouru 1,6 million de kilomètres, pour onze accidents mineurs, la plupart causés par d’autres usages de la route. (Keystone)
Les nouveaux véhicules autonomes de Google rouleront dans quelques jours. Les modèles précédents ont parcouru 1,6 million de kilomètres, pour onze accidents mineurs, la plupart causés par d’autres usages de la route. (Keystone)

Les systèmes multimédias s’imposent dans les habitacles. Ford et Toyota tentent de résister. En parallèle, Google fera bientôt rouler sa nouvelle voiture électrique autonome

Et si les constructeurs automobiles, vampirisés par Google et Apple, subissaient le même sort qu’IBM dans les années 1980? Ultra-dominateur sur le marché informatique, «Big Blue» avait décidé de se concentrer sur la fabrication d’ordinateurs, laissant Microsoft développer Windows. Or les consommateurs ne se préoccupaient plus de qui assemblait le PC. Mais s’intéressaient aux logiciels à l’intérieur. Il y a quelques jours, dans une opinion parue sur le site TechCrunch, le directeur d’une start-up prédisait le même sort à GM, Toyota ou Volvo: si vous laissez Apple et Google prendre le contrôle total des systèmes internes de vos voitures, vous ne pourrez plus vous différencier. Et vous risquez la disparition.

Ces jours, les constructeurs choisissent leur camp. Jeudi, Toyota a dit préférer le système multimédia de Ford pour interagir avec le smartphone du conducteur. Il lui permettra d’accéder, via la reconnaissance vocale, l’écran et les commandes de bord, à ses applications mobiles telles que la messagerie, le divertissement ou les informations. En face, le 26 mai, Hyundai présentait sa première voiture équipée du système Android Auto de Google. Le lendemain, General Motors affirmait que ses prochains modèles seraient dotés du système CarPlay d’Apple et d’Android Auto, dès le 24 juin.

Porté par les deux groupes de la Silicon Valley, dont les services sont identiques, le nombre de voitures connectées va décoller.

De 2014 à 2020, il va passer de 23 à 152 millions, estime le cabinet de recherche IHS Automotive. Apple et Google veulent ainsi devenir incontournables dans l’habitacle. Certains constructeurs veulent trouver des alternatives. Audi, BMW et Mercedes tentent ainsi depuis plusieurs jours de racheter le service de cartographie Here, mis en vente par Nokia. Mais cela ne remplacera pas un système complet de connectivité.

«Les constructeurs ont investi tellement pour développer leurs propres systèmes qu’ils ont de la peine à dire «OK, Google et Apple, bienvenue!» affirmait récemment Mark Boyadjis, analyste chez IHS Automotive.

Mi-mai, un rapport de Goldman Sachs affirmait qu’Apple et Google risquaient de détrôner Volkswagen, Toyota ou GM.

Capables d’innover, sans la pression de devoir rentabiliser des chaînes de montage coûteuses et à la tête de moyens conséquents – 194 milliards de cash pour Apple –, les deux multinationales deviendraient capables de dicter les règles, selon la banque. Exactement comme Google l’a fait avec Android. Comme son système équipe 80% des nouveaux smartphones, c’est lui qui impose à Samsung, LG ou Sony les spécifications de leurs téléphones.

Google pourrait aller plus loin. «La société développe les logiciels pour les voitures sans conducteur, ainsi que les cartes en haute définition qu’elles requièrent, affirme Egil Juliussen, directeur de la recherche chez IHS Automotive. Cela peut représenter un domaine d’activité substantiel pour Google. Il est moins aisé de savoir ce qu’Apple pourrait faire.» Au début du printemps, la firme de Tim Cook était supposée développer, d’après des fuites, une voiture avec son «projet Titan». Depuis, rien n’a filtré, si ce n’est cette phrase, fin mai, lâchée par un directeur: «La voiture est l’appareil mobile ultime, non?»

Google, lui, avance. Dans quelques jours, il passera à la phase trois de son projet de voitures autonomes. Les premières Lexus sans conducteur ont roulé 1,6 million de kilomètres sur les routes publiques de Californie.Les prototypes de voitures biplaces, conçues, elles, par Google, ont roulé sur les rues des campus de la multinationale. D’ici peu, ces voitures entreront dans l’espace public. Une vingtaine de prototypes électriques, capables de rouler à 40 km/h, sont prêts. En cas d’urgence, une pédale de freins et un volant amovible sont utilisables.

La commercialisation des premiers modèles est attendue pour 2020. IHS Automotive prévoit qu’en 2030 ces véhicules autonomes ne représenteront que 3,2% des ventes mondiales. La voiture devient ainsi un service, estime Egil Juliussen. «Là encore, Google concevra les logiciels et les cartes, d’autres sociétés fabriquant les véhicules. Des flottes de ces voitures seront déployées dans des villes par des sociétés telles qu’Uber, des sociétés de location de véhicules ou encore des compagnies de taxis.»

Au point, estime Mark Boyadjis, de nous faire renoncer à des achats de voiture: «Selon un sondage, aux Etats-Unis et en Allemagne, 40% des propriétaires de voitures abandonneraient leur automobile s’ils pouvaient s’abonner à un service de voitures autonomes sur demande.» Du coup, estimait récemment Barclays, ces innovations pourraient réduire de 40%, d’ici à 25 ans, la production de voitures classiques.

source : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/7133a290-0bae-11e5-b8f6-5d331e67f11f/Avec_leurs_innovations_Google_et_Apple_menacent_les_constructeurs_automobiles

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