Spaceknow, l'entreprise qui analyse le monde
Publié le 13 Mars 2017
Spaceknow, l'entreprise qui analyse le monde
La start-up étudie en permanence des milliers de photographies satellite pour en tirer des informations sur l'activité humaine
Peut-on déterminer le niveau d'activité d'une usine automobile en calculant le taux d'occupation de ses parkings ? Celui d'un port de commerce en observant, depuis l'espace, le mouvement des navires ? Pavel Machalek en est convaincu.
Le cofondateur et dirigeant de Spaceknow l'a expliqué, vendredi 10 mars, lors du festival de technologie South by Southwest (SXSW), organisé à Austin, au Texas, jusqu'au 14 mars. Le but de son entreprise est ambitieux : tirer de milliers de photographies satellite du globe des informations sur l'activité humaine et les analyser.
Spaceknow, qui recrute ses principaux clients dans les rangs de la finance et de la défense, vient de lever 4 millions de dollars (3,73 millions d'euros) de fonds et emploie une trentaine de salariés, principalement aux Etats-Unis.
Apprentissage
Sa mission, dantesque, est désormais facilitée par l'abaissement du coût des images spatiales et le développement de l'informatique " en nuage ", qui permet de mobiliser d'importantes capacités de calcul pour un coût modique.
Le pari de Spaceknow est donc d'utiliser l'intelligence artificielle, et plus précisément l'apprentissage machine, pour numériser et automatiserses tâches. Des milliers d'images satellite, de bateaux par exemple, sont soumises au programme de Spaceknow, qui finit par pouvoir les reconnaître tout seul sur de nouvelles images. " C'est comme apprendre à un enfant ", résume M. Machalek.
Un des services phares de Spaceknow consiste à cartographier en permanence plus de 6 000 zones industrielles en Chine pour déduire leur niveau d'activité. Selon Pavel Machalek, l'activité ainsi mesurée ne correspond pas aux statistiques officielles chinoises. Spaceknow propose aussi l'Africa Night Light Index : une mesure de l'intensité lumineuse dans 53 pays d'Afrique. Un moyen, a expliqué M. Machalek au Monde après sa conférence, d'évaluer l'activité économique " par procuration ", dans des zones où " les chiffres ont du retard, ou sont inexistants ".
Faire reconnaître à un ordinateur ce qu'il " voit " sur une image satellite est une chose, interpréter ces données pour comprendre les phénomènes en cours en est une autre. Pour cela, Spaceknow croise ses propres informations avec des " données secondaires " (bases de données spécialisées, réseaux sociaux…), même si, de l'aveu même de son dirigeant, les indices proposés par Spaceknow ne sont pas parfaits.
A terme, son cofondateur aimerait faire analyser par son intelligence artificielle l'intégralité du globe, en permanence, afin de " comprendre, de saisir toute l'activité humaine ". Le discours, rodé et exalté, est un classique de la Silicon Valley : " La question, c'est comment vous utilisez cette technologie pour faire le bien, pour accroître le bonheur, rendre la société meilleure. C'est une fantastique capacité à voir le monde avec plus de clarté. "
Lorsqu'un membre du public fait valoir que cela pourrait aussi être assimilé à de la surveillance, M. Machalek tente de rassurer : " Notre technologie ne peut pas vous voir vous, individuellement, vous n'êtes pas personnellement identifiables. " Pour lui, cela correspond à une évolution de la société : " En 1995, si j'avais dit à mes amis que nos conversations et toutes nos relations seraient en ligne, on m'aurait traité de fou. Pourtant, maintenant que tout le monde le fait, c'est normal. " Et d'improviser une autre comparaison : " Quand vous êtes à l'extérieur, vous ne vous attendez pas à avoir une vie privée. C'est comme si je me promenais dans la rue avec un appareil photo. Sauf que là, l'appareil est au-dessus de vous.
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