Cyberlove : la révolution est là ! Les technologies de la communication (NTIC) ont tout changé

Publié le 19 Janvier 2018

« Les différences abyssales qui existaient dans les pratiques déclarées entre les deux sexes connaissent un alignement progressif autant au niveau du nombre déclaré de partenaires, des “coups d’un soir”, des plans à trois… Il y a désormais une disjonction entre sexualité et affectivité. »

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Cyberlove : la révolution est là !
Cyberlove : la révolution est là ! Les technologies de la communication (NTIC) ont tout changé

Les technologies de la communication ont absolument tout changé : à commencer par les pratiques amoureuses et lascives de nos contemporains qui mutent désormais à grande vitesse, décrypte François Kraus à l’ifop.

lle est à l’œuvre. On ne la voit pas. Elle est pourtant là. Et elle change tout… L’Ifop la suit depuis presque dix ans, par le biais d’enquêtes régulières menées pour le compte de leurs clients, le plus souvent des acteurs du porno ou des sites de rencontres.

La cybersexe révolution en 5 points… + 1 autre que l’on voit moins… et qui est pourtant bien présent. 

Décryptage avec François Kraus, directeur des études au pôle Politique/Actualité de l’Ifop

Les conséquences sont très visibles, notamment chez les jeunes femmes urbaines cadres : le nombre de partenaires s’est envolé, et elles ont désormais une vraie vie sexuelle avant que d’être en couple, avant leur premier enfant, éventuellement même pendant leur vie maritale… et entre deux histoires sérieuses…

 

LES PRATIQUES DES HOMMES ET DES FEMMES TENDENT À SE RAPPROCHER

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« Les différences abyssales qui existaient dans les pratiques déclarées entre les deux sexes connaissent un alignement progressif autant au niveau du nombre déclaré de partenaires, des “coups d’un soir”, des plans à trois… Il y a désormais une disjonction entre sexualité et affectivité. »

En 1982, dans son article « L’homosexualité masculine ou le bonheur dans le ghetto », Michel Polak décrivait le phénomène des boîtes gay qui permettaient non seulement une forme d’anonymat, mais aussi la connexion à une multitude de gens ouverts aux rencontres.

Aux mêmes causes, les mêmes effets : le foisonnement des sites et des applis a permis aux hétéros de multiplier les occasions.

« Les conséquences sont très visibles, notamment chez les jeunes femmes urbaines cadres : le nombre de partenaires s’est envolé, et elles ont désormais une vraie vie sexuelle avant que d’être en couple, avant leur premier enfant, éventuellement même pendant leur vie maritale… et entre deux histoires sérieuses… »

Le sexe est un prémice – c’est parce que cela se passe bien au lit que l’on envisage d’aller plus loin.

 LA LIBÉRATION (DU SEXE) DE LA FEMME… C’EST MAINTENANT !

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Autrefois étroitement associée à la conjugalité, la libéralisation de la sexualité féminine est sans doute l’un des phénomènes les plus prégnants de la cybersexe révolution.

« Jusque dans les années 1970, un homme devait faire sa cour pendant plusieurs mois, et avec une certaine retenue. » Ce modèle a clairement explosé. Maintenant, « le sexe est un prémice – c’est parce que cela se passe bien au lit que l’on envisage d’aller plus loin ».

L’exemple de la masturbation est également intéressant. « La femme a été conditionnée pour inscrire sa sexualité dans une vie de couple, et elle n’est pas censée avoir une sexualité purement individuelle. Cela restait donc un énorme tabou. Dans nos enquêtes autoadministrées, chez les plus jeunes, il n’y a presque plus de différences déclarées entre hommes et femmes dans la pratique de la masturbation. »

LA MONTÉE DES PRATIQUES MINORITAIRES

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Cyberlove : la révolution est là ! Les technologies de la communication (NTIC) ont tout changé

En offrant un potentiel énorme de rencontres en dehors du cercle amical et professionnel, les sites et les applis de rencontres ont favorisé les formes de sexualité sans lendemain, l’infidélité, mais également des pratiques autrefois minoritaires.

 « L’échangisme et ses différentes nuances, par exemple, ont toujours été restreint.e.s à une population adulte, plutôt csp +. Les sites spécialisés ont provoqué une massification, une démocratisation et un rajeunissement des pratiquant.e.s. 

On voit arriver des populations nouvelles qui se doivent d’ailleurs d’apprendre les codes : on ne se jette pas sur tout le monde, c’est la femme qui décide… »

Chez Wyylde, premier réseau social libertin, on fait le même constat. « Depuis plusieurs mois, nous observons un phénomène : un tiers des nouveaux.lles inscrit.e.s ont entre 20 et 30 ans, alors que la moyenne d’âge de nos utilisateur.rice.s a toujours été entre 40 et 45 ans. Ils et elles ne se définissent plus comme libertin.e.s, ils et elles font juste la même chose, souvent en plus hard », confie Benjamin Warlop, responsable communication du site.

Ces pratiques remettent en cause un principe longtemps fondamental de la représentation générale du couple : l’exclusivité sur le sexe de l’autre .

« Le parcours fantasmatique évolue beaucoup plus vite. On passe à des jeux qui étaient envisagés autrefois de manière assez exceptionnelle, dans une logique d’entretien de la libido du couple. »

LA FOLIE DES SEXTOYS

Le marché s’emballe. « Je n’ai jamais vu une telle courbe d’adoption, sur aucun autre type de produits. »

Certes, le marché a beaucoup évolué. « Autrefois, il fallait aller rue Saint-Denis pour acheter dans des endroits repoussants des objets plutôt rebutants. »

Effectivement, les produits ne cessent d’innover pour améliorer leurs performances et répondre à tous les goûts, toutes les pratiques, toutes les zones érogènes.

Les boutiques ensuite sont plus raffinées, géographiquement plus accessibles, et se sont beaucoup féminisées.

Quant à la vente sur Internet, elle permet d’acheter et de se faire livrer en toute discrétion.

MILLENNIALS : QU’EST-CE QUI CHANGE ?

Biberonné.e.s à la culture porno, assez logiquement, elles et ils reproduisent au lit ce qu’elles et ils ont découvert sur leurs écrans. 

Fellation – pénétration – éjaculation faciale : la trame de base des scénarios des films porno se rejoue désormais dans la vraie vie.

« Pour la génération au-dessus de 50 ans, la seule fellation était une pratique que les hommes ne pouvaient presque pas demander. Elle marquait une différence culturelle forte entre Anglo-Saxon.e.s et Latin.e.s. Chez les Romain.e.s déjà, elle était très mal connotée parce que la stature sociale d’un homme était liée à la qualité de sa parole, et mettre le sexe en bouche était une chose très mal vue. À l’inverse, dans la culture anglo-saxonne ou scandinave, c’est un préliminaire et une caresse réciproque beaucoup plus banalisée qui n’implique pas forcément un rapport sexuel. »

Mais les millennials ont aussi développé le goût pour le sexe virtuel : sextape (le fait de filmer ses ébats) et autre sexting (envoyer des SMS érotiques), et l’usage de la webcam ont intégré leurs échanges.

Par ailleurs, trop de porno tue le porno, et les plus jeunes sont un peu las de regarder des gens qui font semblant. Ils préfèrent les jeux du voyeurisme virtuel. Voir de vrais gens faire de vrais choses, en real time, et pouvoir interagir avec eux répond davantage à leurs attentes.

Si certain.e.s jeunes entrent dans la vie sexuelle plus tôt, nous avons aussi une majorité qui évolue plus lentement, et parallèlement un retour du religieux.

LA FRACTURE QUE L’ON NE VOIT PAS…

« Nous devons relativiser l’idée d’une jeunesse débridée qui serait beaucoup plus avancée sexuellement. C’est quelque chose que l’on observe, mais la jeunesse est surtout beaucoup plus fragmentée qu’avant. 

Si certain.e.s jeunes entrent dans la vie sexuelle plus tôt, nous avons aussi une majorité qui évolue plus lentement, et parallèlement un retour du religieux. Chez les catholiques, le mouvement de La Manif pour tous a relancé les valeurs du « pas avant le mariage », une idée qui est prégnante aussi chez certain.e.s musulman.e.s. Il est délicat de dater ce phénomène. Jusque dans les années 1990, on pouvait observer une tendance à l’intégration aux mœurs dominantes, mais depuis quelques années, on observe que l’âge du premier rapport réaugmente. Cela s’explique sans doute en partie sous l’influence de ces courants. Mais il est très compliqué de l’affirmer, car nous manquons de données. »

À noter : Pour les instituts de sondages, il reste complexe d’obtenir des données sur les pratiques sexuelles des mineurs (moins de 15 ans) comme des personnes âgées alors même que ces deux populations connaissent également des bouleversements énormes dans leurs pratiques.

 

source : http://www.ladn.eu/reflexion/vu-dans-la-revue/les-evolutions-de-nos-pratiques-amoureuses-selon-lifop/?utm_source=newsletter_ladn&utm_medium=email&utm_campaign=news_janvier_2018&utm_content=20180115 

LES GRANDES ENQUÊTES À CONSULTER

Les rapports Kinsey : menés par le Dr Alfred Kinsey sur le comportement sexuel humain. Le premier est paru en 1948, le second en 1953.

Rapport Simon : étude sur le comportement sexuel des Français, 1970. Inspiré des rapports Kinsey, il est commandé par le gouvernement Chaban-Delmas en 1969, et favorisera la mise en place de l’éducation sexuelle à l’école. Quelque 2 625 personnes seront interrogées.

« Analyse des comportements sexuels en France dite ACSF », menée en 1992 sur 20 000 personnes par Nathalie Bajos et Alfred Spira.

« Contexte de la sexualité en France », Nathalie Bajos et Michel Bozon, enquête menée en 2006 sur 12 000 personnes âgées de 18 à 69 ans (parue sous le titre : Enquête sur la sexualité en France. Pratiques, genre et santé, Nathalie Bajos et Michel Bozon [dir.], La Découverte, 2008.)

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