Le 4ème pouvoir (les médias) peut-il encore légitimement exister ? HOLD-UP un pavé dans la marre ?

Publié le 11 Décembre 2020

L'argument du complotiste c'est l'argument de ceux qui n'en ont pas !

Pierre Barnérias, le réalisateur du documenteur Hold-up

Mais que font les journalistes aujourd'hui ?
Sont-ils encore capable de susciter un débat contradictoire ? Je crains que NON

Pierre Barnérias, le réalisateur du documenteur Hold-up

On n'écrit pas un film pour la presse. J'en ai rien à faire de leur avis.
Ce film HOLD-UP propose juste une contradiction. En 10 mois aucune question n'a été posé pour aller dans le sens du questionnement. HOLD-UP a osé le faire.

C'est par la différence qu'on s'enrichit

En quoi ce document n'est pas un film ? En quoi ce film HOLD-UP est un complot ? Que ces personnes développent !

Pierre Barnérias, le réalisateur du documenteur Hold-up

Christian Lehmann est médecin et écrivain. Pour «Libération», il tient la chronique d'une société suspendue à l'évolution du coronavirus. Aujourd'hui, le témoignage du médecin Jérôme Marty qui a été invité sur W9 à participer à un débat sur le «documentaire» aux théories farfelues.

Depuis un moment je me dis que tout ceci, qui a mal débuté, pourrait mal finir. Les soignants ont commencé l’année en affrontant le coronavirus dans la plus grande confusion, sans équipements de protection, et la terminent sous les accusations des complotistes et des négationnistes, accusés par certains de leurs pairs de profiter financièrement de la pandémie ou de se rendre complices d’un génocide.

Jérôme Marty, président de l’Union française pour une médecine libre, en a fait l’expérience. Auteur d’un livre documenté sur le Scandale des soignants contaminés chez Flammarion, peu suspect de complaisance envers la gestion gouvernementale, il reçoit régulièrement des mails injurieux, des lettres de menace, après chaque apparition dans les médias où, avec l’accent toulousain et un franc-parler qui n’appartient qu’à lui, il martèle la réalité de l’épidémie face aux experts en courbes et statistiques :

«Le 23 novembre j’ai été invité par la chaîne W9 à participer à un débat sur le complotisme, autour du "phénomène Hold-up" comme le présentait la chaîne pour teaser l’émission. C’était pour moi l’occasion de confronter enfin ces médecins qui traitent leurs confrères en première ligne d’assassins vendus au gouvernement.

«Martine Wonner, députée antimasques, et Violaine Guérin de l’association Laissez les prescrire devaient être présentes, ainsi qu’Astrid Stuckelberger, médecin anti-âge en Suisse… Surprise à mon arrivée. Martine Wonner s’est décommandée, et Violaine Guérin, à peine arrivée, tourne les talons et s’enfuit. Pris de court, les organisateurs invitent non sans mal Pierre Barnérias, le réalisateur du documenteur Hold-up. Dès le début Barnerias va fuir ses responsabilités : il est un artiste, le réalisateur d’une œuvre, ce n’est pas lui qui parle, ce sont les experts, des experts de renommée internationale à qui il a simplement donné la parole, dans le but louable de créer le débat. Il apparaîtra sincèrement navré quand en plateau, Rudy Reichstadt (de Conspiracy Watch) et moi allons expliquer que Hold-up n’est pas un documentaire mais un empilement de théories farfelues, d’affirmations dangereuses, de mensonges diffamatoires à l’égard des médecins, et de dérives conspirationnistes aux relents sectaires.

Comme si nous étions dans une maternelle

«J’interviens pour poser un léger bémol à l’image d’Epinal de l’artiste désintéressé mettant humblement sa caméra au service de la vérité : Hold-up, qui porte bien son nom, a coûté 20 000 euros et a rapporté près de 500 000 euros de financement sur des plateformes participatives. Le choix des intervenants ne doit rien au hasard. Barnérias a fait parler des gens qui expliquent que la Lune est un satellite artificiel creux, des responsables d’essais sauvages sur des enfants autistes, un antivax qui prétend qu’une molécule lui a été révélée par Dieu, le dirigeant d’un "institut de valorisation des données de santé" comptant… un employé, un anthropologue promoteur du chamanisme et de la chirurgie psychique à mains nues, une députée qui déclare que "le masque ne sert à rien", un vendeur d’extracteur de jus du gourou Thierry Casanovas, une "profileuse" condamnée pour escroquerie envers une famille endeuillée, et deux prix Nobel, l’un en roue libre depuis des années qui explique qu’il peut téléporter de l’ADN, l’autre qui a affirmé que l’épidémie prendrait fin aux Etats-Unis au mois d’août…

«Pierre Barnérias prétend découvrir tout ceci. Ce qui compte, ce n’est pas le passé des intervenants, ce n’est pas ce qu’ils ont fait, mais c’est ce qu’ils disent. Mais enfin qui peut croire qu’un documentariste fait intervenir des personnes sans s’être renseigné sur leur cursus, leur crédibilité, leurs publications passées ? Barnérias qualifie même de "lanceur d’alerte" Silvano Trotta, un illuminé sans aucune compétence médicale qui explique doctement sur sa chaîne Youtube que la Lune est creuse. Il lui est alors montré l’intervention de Monique Pinçon-Charlot (qui s’est depuis désolidarisée du film). Elle y affirme qu’une guerre est menée par les plus riches contre les plus pauvres, "comme les nazis allemands l’ont fait pendant la Seconde Guerre mondiale, il y a un holocauste qui va éliminer certainement la partie la plus pauvre de l’humanité c’est-à-dire 3 milliards 500 millions d’êtres humains". Je demande à Barnérias : "Quand vous entendez ça, ça ne vous alerte pas ? Quand on vous parle d’holocauste comme l’ont fait les nazis, quand on vous parle de la disparition programmée de 3,5 milliards d’êtres humains, ça ne vous alerte pas ? C’est normal ? Vous le mettez dans votre film ?" Astrid Stuckelberger intervient en duplex, pour parler des masques, dont le port ne sert à rien, et d’ailleurs il n’est qu’à voir les boites de masques chirurgicaux ou il est écrit "ne protège pas des infections".

«Je reste un instant stupéfait, puis sens monter la colère. Nous sommes le 23 novembre, cette fake news a été débunkée depuis février, époque où nous cherchions fébrilement à nous équiper en masques pour protéger le personnel soignant. Je soupire et j’accepte donc de rappeler, comme si nous étions dans une maternelle, à quoi sert un masque et pourquoi il y a cette inscription sur ces boîtes. Ce rappel, je devrais normalement le faire à une enfant qui s’étonnerait de cette inscription, pas à une "chercheuse et enseignante à la faculté de médecine de l’Université de Genève et de Lausanne, experte internationale dans différents domaines liés à la santé et à la santé publique, dont les principaux axes de travail concernent les questions relatives au vieillissement de la population et aux individus, l’égalité des sexes, l’équité et les déterminants sociaux de la santé, l’innovation de rupture et les technologies de la santé, les droits de l’homme et l’éthique ainsi que les réglementations et politiques internationales".

«Parfois les longues lignes du CV masquent les idées courtes. Je lui rappelle donc qu’un masque chirurgical n’est pas clos et effectivement ne protège pas totalement celui qui le porte d’une contamination virale par voie aérienne, mais que le but de son utilisation est de faire barrière à une éventuelle excrétion virale. Le masque est donc porté pour protéger l’autre, un concept apparemment étranger à Astrid Stuckelberger comme à Martine Wonner… et c’est la somme des ports de masques par chaque individu qui diminue la concentration virale aérienne et donc le risque de contamination. Je rappelle que seuls les masques FFP2 protègent les soignants en présence du Covid et je centre mon propos sur les contaminations de nos consœurs et confrères qui consultaient sans masque lors de la première vague, qui ont bouffé du virus et qui en sont morts. Je fixe cette femme qui ne s’est jamais confrontée au virus et vient vomir sur nos morts. Je rappelle aux animateurs de la chaîne la responsabilité de certains médias qui ont invité tout l’été des rassuristes, des négationnistes de l’épidémie, dont certains recyclent leurs arguments pitoyables dans Hold-up.

De prétendus experts

«On n’a pas écouté les médecins de terrain qui alertaient dès juillet. Quand nous disions : il y a des malades en ville, ils nous disaient il n’y a pas d’hospitalisation. Quand il y a eu des hospitalisations, ils ont dit il n’y a pas de réanimation. Quand il y a eu des réanimations ils ont dit il n’y a pas de morts. Quand il y a eu des morts ils ont dit les hôpitaux ne sont pas submergés. Et quand les hôpitaux ont été submergés ils ont dit les malades meurent d’autres choses que du Covid. Et vous savez quelle est la constante de ceux qui disaient cela ? Ce sont des médecins qui ne touchent pas les malades, et que la maladie ne touche pas. Ce sont de prétendus experts qui voient les malades en courbes et en statistiques. Et c’est ceux-là qui étaient écoutés, que l’on a fait intervenir partout.

«Je n’aime pas ce terme, "les rassuristes". Ils portent la responsabilité, au moins en partie, du retard de réaction des politiques. Pendant ce temps, les soignants sur le terrain se confrontaient à la maladie. Pendant ce temps dans nos cabinets, en ville, à l’hôpital, en réa, on vivait le virus. Pendant ce temps certains d’entre nous couchaient les patients sur le ventre, pendant ce temps nous vivions avec le doute et la crainte, pendant qu’assis sur leur cul, les «rassuristes» disaient il ne se passe rien… La journaliste pose enfin la question de la dangerosité de cette compilation de témoignages. Rudy Reichstadt va expliquer le mécanisme du complot, son architecture, le mille-feuille argumentatif, succession rapide d’affirmations sans réel fil conducteur, l’absence de solution proposée, l’absence de contradiction, le flou savamment entretenu, un mécanisme où tout se vaut, où tout est possible puisque affirmé avec autorité.

«Dégueulasse et dangereux»

«Plus prosaïque, je m’adresse à nouveau à Barnerias : "Oui ce documenteur est dangereux, parce qu’il dit que les médecins ont tué des patients dans les Ehpad. Votre film affirme que l’on a euthanasié des patients au Rivotril… Je suis gériatre, j’ai un service avec des lits de soins palliatifs, le Rivotril a permis de faire face à la rupture de Midazolam, afin de permettre une sédation et un soulagement à des patients en fin de vie, condamnés. Il a été utilisé dans un contexte de soins palliatifs dans le cadre de la loi Claeys Leonetti, vous savez ce que c’est ?" Barnerias ne sait pas, il ne sait rien, il n’est pas un scientifique (il le répétera plusieurs fois). Je rappelle que ces soins palliatifs sont encadrés, protocolisés, ils se font en collégialité, avec l’accord du patient si celui est possible, de sa personne de confiance et ou de sa famille, dans le respect de ses directives anticipées avec parfois l’appoint d’une équipe de soins palliatifs.

«"Le Rivotril a été utilisé pour ses propriétés anxiolytiques alors que des patients s’étouffaient, mourraient d’étouffement. Quand Violaine Guerin affirme que les médecins inventent des patients Covid parce que la cotation rapporte plus ou quand il est affirmé que les médecins sont intéressés au diagnostic de Covid et multiplieraient les diagnostics contre quelques pièces, c’est dégueulasse et c’est dangereux parce qu’il y a nombre de personnes fragiles ou crédules dans nos rues, imaginez qu’une de ces personnes prenne au pied de la lettre les affirmations qu’il y a dans votre film, alors un médecin pourrait être agressé, alors un médecin pourrait se faire tuer, et c’est vous qui en serez comptable, c’est vous qui en serez responsable et nous serons là pour vous le rappeler…"

«Hold-up est une insulte aux soignants qui se dévouent au chevet des patients, il ne pose pas les bonnes questions, il les écarte, il invente une réalité, et masque les responsabilités. Oui, il y a eu des mensonges, des manipulations politiques, des retards, sur les masques, sur les tests, sur les modes de contamination, sur les moyens d’y faire face. Mais il n’y a pas de complot. Juste la bêtise, la fatuité, la lâcheté, la peur, la faiblesse politique, la lourdeur administrative paralysante et les egos imbéciles… Il n’y a rien de mystérieux là-dedans, juste des politiques, des scientifiques, des journalistes, des femmes et des hommes, forts ou faibles, courageux ou lâches, qui se sont heurtés, comme nous tous, à la réalité de l’inconnu. Pas de Lune creuse, pas de "Great reset", pas de complot illuminati, pas de plan diabolique que seul pourrait éviter Donald Trump, sauveur de l’humanité. Non, rien de tout ça. Juste, fidèle à elle-même, la conjuration habituelle des imbéciles et des crapules…»
 

source : https://www.liberation.fr/france/2020/12/07/hold-up-courage-fuyons_1807886

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